20/11/2025

Démêler les coûts cachés du partage des biens après un divorce : notaire, tribunal et autres frais

Comprendre la répartition des frais lors d’un divorce : ce qui est obligatoire et ce qui ne l’est pas

Lorsqu’un divorce est prononcé et que le couple possède des biens en commun – que ce soit une maison, un appartement, des livrets d’épargne ou encore un véhicule – la question du partage est inévitable. Ce partage, aussi appelé “liquidation du régime matrimonial”, implique plusieurs étapes juridiques et donne lieu à différents frais, qu’il s’agisse des émoluments du notaire ou des frais engagés par la procédure judiciaire. Pour beaucoup, le montant total peut représenter un enjeu crucial, d’autant que certains frais ne sont pas toujours anticipés.

Entre la nécessité d’un acte notarié, les frais de justice, la “taxe de partage” et des dépenses annexes telles que l’expertise ou les émoluments d’un avocat, il est essentiel de bien distinguer les postes de dépenses, de savoir qui doit les payer, et comment, le cas échéant, les limiter.

La liquidation du régime matrimonial : passage obligé et rôle du notaire

Tout partage de biens communs implique une étape de liquidation. Cette liquidation, qui peut se faire à l’amiable ou dans le cadre d’un divorce judiciaire contentieux, consiste à dresser un inventaire, évaluer les biens et procéder à leur attribution ou à leur vente. Pour les couples mariés sous le régime de la communauté (le cas le plus fréquent), cette opération se réalise sous le contrôle d’un notaire dès qu’il s’agit d’un bien immobilier.

  • Pour les patrimoines comprenant uniquement des biens mobiliers (voiture, meubles, comptes bancaires), l’acte notarié n’est pas obligatoire. Mais il est vivement recommandé pour sécuriser la répartition.
  • En présence d’un bien immobilier, l’intervention du notaire est systématiquement requise (article 229-3 du Code civil).

Quels sont les frais notariaux lors du partage des biens après divorce ?

1. Émoluments du notaire : un barème réglementé

Le notaire perçoit des émoluments pour son travail. Ce sont des tarifs réglementés fixés par l’État. Pour la liquidation-partage, le calcul s’opère sur la valeur globale des biens à partager.

Par exemple, pour le partage d’un bien immobilier d’une valeur de 250 000 €, le barème applicable au 1er janvier 2023 (cf. Service-public.fr) prévoyait :

  • 2 % HT sur la fraction inférieure ou égale à 6 500 €
  • 0,83 % HT entre 6 500 € et 17 000 €
  • 0,55 % HT entre 17 000 € et 60 000 €
  • 0,44 % HT au-delà de 60 000 €

Sur un actif net de 250 000 €, les émoluments s’élèvent donc environ à 1 370 € hors taxes. À cette somme s’ajoutent la TVA (20 % depuis 2014) et, parfois, des “frais et débours” : coûts facturés par le notaire pour obtenir certains documents administratifs (état hypothécaire : 20 €, certificat d’urbanisme : 20 €…).

2. Taxe de partage ou droit de partage : une fiscalité propre au divorce

Au-delà des honoraires du notaire, chaque partage amiable ou judiciaire donne lieu à un impôt appelé “droit de partage”, collecté par le notaire pour le compte du Trésor Public. En 2024, son taux est :

  • 1,1 % de l’actif net partagé (déduction faite des dettes communs : capital restant dû sur un emprunt immobilier, par exemple).

Avec notre exemple d’un bien immobilier partagé de valeur 250 000 €, la taxe de partage s’élèvera donc à 2 750 €.

3. Frais annexes notariaux à anticiper

  • Frais de publication au service de la publicité foncière (~0,10 % du prix),
  • Frais pour copies authentiques,
  • Frais d’expertise si la valeur de certains biens est contestée (un expert immobilier peut facturer de 500 à 1 500 €, selon la complexité du bien).

Un point de vigilance : la loi ne fixe pas obligatoirement le paiement des frais de notaire aux deux époux. Souvent, ces frais sont partagés par moitié, mais un accord contraire peut être trouvé (article 815-17 du Code civil).

Les frais judiciaires en cas de désaccord : que coûtent un partage judiciaire et l’intervention du tribunal ?

Lorsque les conjoints n’arrivent pas à un accord sur la répartition des biens, la phase amiable laisse place au partage judiciaire. Le juge aux affaires familiales (JAF) est alors sollicité.

Honoraires d’avocats : une variable importante

Dans le cadre d’un partage judiciaire, la représentation par un avocat est obligatoire en première instance devant le tribunal judiciaire (article 760 du Code de procédure civile). Les honoraires varient selon la complexité du dossier et la valeur des biens en jeu :

  • En moyenne, le coût d'un avocat pour une procédure de partage oscille entre 1 500 € et 5 000 € TTC par époux. Certains dossiers exceptionnels peuvent entraîner des honoraires supérieurs, notamment en cas de recours ou d’expertises multiples.
  • Les plus modestes peuvent demander l’aide juridictionnelle afin que leurs frais d’avocat soient pris en charge en partie ou en totalité par l’État.

Frais de procédure et d’expertise judiciaire

  • Frais de consignation : pour couvrir l’intervention d’un expert judiciaire (par exemple pour estimer des biens immobiliers), le juge peut ordonner une consignation de plusieurs centaines à plusieurs milliers d’euros, à avancer par les parties.
  • Huissier : pour dresser l’inventaire des biens, signifier des actes (signification d’ordonnance de partage), des frais de 80 à 150 € par acte sont courants.
  • Des frais de procédure de 150 à 300 € peuvent s’appliquer pour l’ouverture du dossier au tribunal (ex : contribution pour l’aide juridique dans certains TGI).

Quelques cas concrets : panorama de coûts en situation réelle

  • Pour une procédure de partage judiciaire avec litige sur l’estimation de deux maisons, honoraires d’avocats et experts peuvent grimper à 8 000 € sur un patrimoine évalué à 400 000 € (Ministère de l’Économie).
  • En cas de partage amiable, les coûts sont, à patrimoine égal, inférieurs de 30 à 50 % à la voie judiciaire.

Frais cachés et dépenses à ne pas sous-estimer : points d’attention

Si l’essentiel des frais de partage concerne le notaire et la fiscalité, d’autres dépenses inattendues peuvent surgir :

  • Pénalités de remboursement anticipé sur les prêts immobiliers si le logement doit être vendu – souvent 3 % du capital restant dû selon la banque (source : UFC-Que Choisir).
  • Éventuels coûts de mainlevée d’hypothèque : à prévoir lors de la revente (d’environ 250 à 600 €).
  • Frais de nouveaux actes juridiques : changement de bénéficiaire d’assurance-vie, modification du titre de propriété, refonte de testaments antérieurs.

Divorce sans bien immobilier : des frais allégés mais pas nuls

Si le patrimoine à partager ne comporte que des biens “meubles” (liste de comptes bancaires, voiture, mobilier) et s’il existe un accord entre les époux, le passage chez le notaire est facultatif. Mais rédiger un protocole d’accord reste conseillé pour éviter toute contestation ultérieure. Dans ce cas :

  • Le coût du partage amiable (hors notaire), se limite aux frais d’avocats (minimum environ 1 200 € par époux pour un forfait de divorce par consentement mutuel).
  • Pas de “taxe de partage” imposée si aucun acte de partage n’est dressé devant notaire (article 746 du Code général des impôts). Mais attention : une déclaration écrite à l’administration fiscale peut être obligatoire si la valeur est importante.

Peut-on réduire les frais de partage ? Stratégies légales à explorer

  • L’amiable avant tout : privilégier la voie amiable permet d’éviter les coûts alourdis de la justice. Plus les conjoints s’accordent sur la liquidation, moins la facture grimpe.
  • Limiter les transactions dans un même acte : un seul acte notarié pour le partage de plusieurs biens coûte moins cher que plusieurs actes séparés (tarification dégressive du notaire).
  • Calculer avec précision l’actif net : bien déduire les dettes (prêts, charges) du montant à partager diminue la base du droit de partage (1,1 %).
  • L’aide juridictionnelle : sous condition de ressources, elle prend en charge une partie ou la totalité des frais d’avocat et d’huissier. Démarche à engager en amont, car l’instruction du dossier prend plusieurs semaines.

Un simulateur du coût du partage sur service-public.fr peut aider à anticiper la dépense (lien ici).

Règles de paiement : qui paie, qui avance ?

Par principe, la répartition des frais suit celle des biens : chaque époux paie en fonction de ce qu’il reçoit (article 815-17 du Code civil). Toutefois, un accord particulier peut prévoir une autre répartition, voire l’avance de la totalité des frais par l’un des conjoints, surtout si le déséquilibre des patrimoines et des revenus est marqué.

À l’issue de la procédure, il arrive que le juge impose tout ou partie des frais à l’un des époux (le plus souvent quand la mauvaise foi d’une partie est démontrée ou si une partie a été déboutée de ses demandes).

Ce qu’il faut retenir – pour anticiper et ne pas subir

Maîtriser les frais du partage des biens après un divorce suppose de combiner préparation, sens de l’anticipation et recours à une information fiable. Les frais notariaux suivent un barème réglementé, mais la “taxe de partage” (1,1 %) pèse lourd dans le budget. La moindre contestation peut multiplier les frais judiciaires. Privilégier l’accord, limiter les emprunts, anticiper la liquidation dès l’amorce du divorce : autant de leviers pour éviter que la facture ne se transforme en mauvaise surprise.

Pour les mises à jour des barèmes et taux en vigueur, se référer aux sites officiels : Service-public.fr, notaires.fr, ainsi que les ressources du Ministère de l’Économie.

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